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"UN JOUR, IL Y AURA UN DRAME" : ALERTE AU CENTRE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE DE LYON

Mercredi 19 Avril - 05:30

Société


Des hommes retenus derrière un grillage. - © DR
Situé tout près de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, le centre de rétention administrative le plus important d'Auvergne-Rhône-Alpes est une fois encore pointé du doigt. Élus et avocats alertent sur les conditions de vie des personnes retenues.


"Ils sont livrés à eux-mêmes, à la merci de toutes les violences", témoigne Marie-Josèphe Laurent, bâtonnière de l'ordre des avocats de Lyon. Vendredi dernier, elle s'est rendue au centre de rétention administrative de Lyon Saint-Exupéry, accompagnée de deux élus du Rhône, dans le cadre de leur droit de visite.

Le centre qu'ils ont inspecté a ouvert ses portes en janvier 2022. Présenté comme un "projet pilote", le bâtiment abrite actuellement 128 personnes en situation irrégulière, dans l'attente de leur expulsion. Elles peuvent y rester jusqu'à trois mois. Une période de rétention qui succède, dans certains cas, à une peine de prison déjà effectuée en France.

"C'est pire que la prison"


"Les personnes retenues que nous avons rencontrées nous ont dit : c'est pire que la prison", poursuit Marie-Josèphe Laurent. "Il n'y a même pas de gardiens pour s'assurer que tout se passe bien. Ils n'ont aucune activité proposée, pas de bibliothèque. Tout ce qu'ils ont, c'est une télé quand elle n'est pas cassée."

Pour le reste, l'avocate évoque "des repas à prendre en 30 minutes maximum", l'absence d'espaces verts dans un environnement "complètement bitumé". Et un accès aux droits fondamentaux clairement restreint.

"Sur une journée, ils ont une heure pour accéder à une zone qui leur permet de faire différentes démarches, de voir un médecin... Ensuite, hop, il faut rentrer dans leur bloc où ils sont une vingtaine, sans rien à faire", ajoute Marie-Josèphe Laurent. "Dans les chambres où ils sont deux, il n'y a pas de verrous. Certains parviennent à s'enfermer en fabriquant des petites cordes avec des bouts de drap. Pour être sûr de ne pas être dérangés la nuit."

D'après la bâtonnière, cette situation explique en partie les violences récurrentes constatées au CRA. En décembre dernier, l'équipe médicale a décidé de quitter les lieux, estimant ne plus être en mesure de travailler dans des conditions normales.

Bientôt une nouvelle "loi immigration"


"Avec ce nouveau CRA, on est passé à une structure pénitentiaire : il n'y pas de liberté de circulation dans le centre, aucun contact avec le personnel. Une promiscuité qui, au bout d'un moment, créé de la violence", affirme Morgan Bescou, avocat membre de la commission droit des étrangers au barreau de Lyon.

"La rétention, c'est une mesure administrative et non pas judiciaire. Donc il y a des droits précis qui vont avec. On a l'impression que la rétention est faite pour punir et pas seulement pour éloigner. Tout y est anxiogène, glaçant. Un jour, il va y avoir un drame", abonde Jean-François Barre, vice-bâtonnier.

Alors qu'un futur texte de loi immigration est en préparation, l'opposition monte au créneau. "Il faut que les CRA soient présents dans les débats parlementaires", insiste Thomas Dossus, sénateur écologiste du Rhône. Présent à la dernière visite du CRA, il alerte régulièrement sur le sujet. "Les CRA sont en train de devenir une prolongation de la peine de prison, pourtant rien ne le permet en droit. Il faut en finir avec ce modèle, et il faut réduire les durées de rétention."

Suite à cette visite, le Barreau de Lyon a saisi le Défenseur des Droits et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, afin de les alerter. Un rapport complet sera prochainement transmis à l'administration.

La préfecture du Rhône assure rester "à l'écoute"


"Le profil des retenus a évolué", tiennent à préciser les services de la préfecture, sollicités par la rédaction. Il s'agit désormais davantage "d'individus plusieurs fois condamnés par la Justice".

En moyenne pour le début de l'année 2023, 86% des retenus ont été arrêtés pour des troubles à l'ordre public, 22% sortaient de prison.

"En ce sens, les personnels du CRA ont développé leurs capacités de médiation et ont modifié leurs modalités d'intervention pour éviter les rixes, notamment en faisant un usage optimisé de la vidéosurveillance et de la caméra piéton", poursuit la préfecture du Rhône, qui assure que les incidents faisant l'objet de plaintes sont "systématiquement pris en compte par le Parquet."

"La préfecture reste à l'écoute des parties prenantes du CRA qu'elle réunit régulièrement afin de parvenir au meilleur équilibre possible", concluent les services préfectoraux.